La réparation de la détention provisoire effectuée à tort par un justiciable obéit à des règles procédurales qui lui sont propres. Outre la spécificité de la juridiction saisie, seuls les préjudices liés à la détention peuvent être indemnisés.
Toute personne qui subit un préjudice peut en solliciter la réparation.
Ainsi, au même titre que les victimes d’un accident de la route, d’une infraction ou d’une erreur médicale; toute personne a été placée injustement à tort peut solliciter la réparation de son préjudice résultant de cette détention.
L’article 149 du Code de procédure pénale dispose ainsi que :
« La personne qui a fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention. »
La procédure de réparation de la détention provisoire
Le requérant doit saisir dans un délai de six mois à compter de la décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement le premier président de la Cour d’appel dans laquelle a été prononcée cette décision.
La décision prise par le premier président de la cour d’appel peuvent faire l’objet d’un recours devant une commission nationale de réparation des détentions, ce dans le délai de dix jours à compter de sa notification.
Cette commission, placée auprès de la Cour de cassation, statue souverainement et ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours, de quelque nature que ce soit.
Les préjudices réparables
Tous les préjudices, qu’ils soient moraux ou matériels, sont réparables pour autant qu’il soit démontré un lien de causalité entre le préjudice allégué et la détention.
Concernant le préjudice moral
S’agissant du préjudice moral de la détention provisoire, la commission tiendra compte de plusieurs facteurs.
- de la situation familiale de la personne au moment de son incarcération : la commission nationale a retenu, comme facteur d’aggravation, notamment, la séparation d’un père et de son nouveau-né (CNRD, 17 décembre 2004, n° 4C -RD.014), ou encore de la naissance d’un enfant pendant la détention (CNRD, 31 mars 2006, n° 5C -RD.060).
- de ses conditions d’incarcération : la commission retient comme facteurs d’aggravations les menaces subies par le demandeur, la surpopulation de la maison d’arrêt, les mauvaises conditions d’hygiène et de confort (CNRD, 20 février 2006, n° 5C -RD.055, bull. n° 4), la vétusté des lieux (CNRD, 29 mai 2006, n° 5C-RD.077), la multiplication des transferts d’un établissement pénitentiaire à l’autre, à l’origine de la rupture des liens familiaux (CNRD, 7 mars 2005, n° 4C-RD. 031)
- L’atteinte à l’image et à l’honneur : la commission a admis récemment une telle indemnisation pour une personne qui était présentée en Une des journaux comme un délinquant majeur dans la presse car emprisonné en dépit des hautes fonctions officielles qu’il exerçait.
- de son passé carcéral : les périodes d’incarcération déjà effectuées sont de nature à minorer le choc psychologique. Cependant, le passé carcéral ne constitue pas nécessairement un facteur d’atténuation du préjudice moral.
Il est important de préciser qu’il n’existe aucun barème d’indemnisation ni d’harmonisation, de sorte que les jours d’incarcération sont indemnisés en fonction du préjudice subi et prouvé au regard des éléments ci-dessus indiqués et non de manière forfaitaire par jour d’incarcération.
Concernant le préjudice matériel
S’agissant du préjudice matériel, il est indemnisé dans les cas suivants :
- Perte de revenus : la personne qui a perdu son emploi en raison de l’incarcération peut demander le montant de ses pertes de salaire subies pendant la durée d’emprisonnement et, après la libération, pendant la période nécessaire à la recherche d’un emploi (CNRD, 21 octobre 2005, n° 5C -RD.005, bull. n° 9), déduction faite des allocations de chômage perçues (CNRD ,18 décembre 2006, n° 6C-RD.045 , bull. n° 15). Le préjudice issu de la suspension, pendant la détention, du versement du revenu minimum d’insertion doit également être indemnisé (CNRD, 17 décembre 2004, n° 4C-RD.021).
- Perte de chance : le requérant peut solliciter la perte de chance de percevoir des salaires lorsque celle-ci est sérieuse (CNRD,21 octobre 2005, n° 5C-RD.001, bull. n° 10). Il peut également invoquer la perte de chance de suivre une scolarité ou une formation ou de réussir un examen entraînant l’obligation de recommencer une année scolaire (CNRD, 2 mai 2006, n° 5C -RD.071).
- Frais de défense : ces frais peut être indemnisés au titre du préjudice matériel que s’ils rémunèrent des prestations directement liées à la privation de liberté et aux procédures engagées pour y mettre fin (CNRD, 21 janvier 2008, n° 7C-RD.048 et n°7C-RD.049). Si la facture d’honoraires énumère de façon détaillée les prestations effectuées pour obtenir la libération du demandeur, ainsi que leur coût , la commission admet le remboursement de tels frais de défense(CNRD, 21 janvier 2008 , n°7C-RD.062).
Il convient de préciser que les premiers présidents comme la commission sont particulièrement attentifs aux éléments versés en justice pour apporter la preuve des préjudices allégués par le requérant. Il est donc important de soigner la constitution de son dossier.
N’hésitez pas à faire appel au cabinet si vous souhaitez être assisté dans ce type de démarches.