Loi Badinter : Qui peut être indemnisé après un accident de la circulation ?

Mieux
comprendre

La loi n°85-677 du 5 juillet 1985, dite loi Badinter, a profondément réformé le régime d’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation. Elle vise à accélérer et faciliter l’indemnisation des victimes, en instaurant un régime protecteur, notamment pour les personnes vulnérables.

Mais qui peut en bénéficier exactement ? Et dans quelles conditions ?

Les victimes non conductrices : la protection maximale

Les piétons, passagers, cyclistes et tiers (ex : personnes se trouvant à proximité d’un accident) sont les grands protégés de la loi Badinter. Leur indemnisation est quasi automatique, sauf faute inexcusable ayant été la cause exclusive de l’accident.

Article 3 alinéa 1er de la loi Badinter : “Les victimes autres que les conducteurs de véhicules terrestres à moteur sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne […] sauf si elles ont volontairement recherché le dommage.”

Protection renforcée des personnes vulnérables :

L’article 3 alinéa 2 prévoit une indemnisation automatique pour :

  • les mineurs de moins de 16 ans ;
  • les personnes de plus de 70 ans ;
  • les personnes handicapées.

Même en cas de faute inexcusable, ils ne peuvent pas être privés d’indemnisation, sauf si leur comportement montre une volonté de nuire.

Cass. Civ. 2e, 20 nov. 2003, n° 01-16.713
La Cour de cassation réaffirme qu’un enfant de 7 ans ayant traversé subitement la route reste indemnisable, même si sa faute est qualifiée d’inexcusable.

Le cas particulier du cycliste

Les cyclistes, bien qu’utilisant un véhicule, ne sont pas considérés comme conducteurs de véhicule terrestre à moteur (VTAM), et bénéficient donc du même régime protecteur que les piétons.

En cas d’accident avec un véhicule motorisé, ils sont indemnisés :

  • même s’ils ont commis une faute simple (ex : non-respect d’un feu) ;
  • sauf si leur faute est inexcusable et cause exclusive de l’accident ;
  • sauf s’ils sont âgés de moins de 16 ans, plus de 70 ans ou en situation de handicap, auquel cas aucune faute ne peut leur être opposée.

Cass. Civ. 2e, 3 juin 2004, n° 03-14.074 :Un cycliste qui franchit un feu rouge et se fait heurter par une voiture n’est pas privé d’indemnisation, car la faute n’est pas jugée inexcusable.

Le conducteur victime : un cas plus complexe

La loi Badinter protège les conducteurs mais de manière moins automatique que les non-conducteurs.

➤ Si le conducteur n’a commis aucune faute, il peut être indemnisé :

  • par l’assureur du véhicule responsable ;
  • ou via son contrat de garantie conducteur.

➤ Si le conducteur est fautif, il ne peut pas se prévaloir de la loi Badinter :

  • Il ne pourra pas engager la responsabilité du tiers ;
  • Il devra compter sur sa garantie conducteur s’il en a une ;
  • À défaut, il ne sera pas indemnisé.

Cass. Civ. 2e, 18 mars 1998, n° 96-11.211 : Un conducteur alcoolisé et seul en cause n’a pu bénéficier d’aucune indemnisation faute d’assurance couvrant son propre dommage corporel.

Les passagers : toujours protégés

Que le passager :

  • soit monté volontairement dans un véhicule conduit par une personne alcoolisée ;
  • ne portait pas sa ceinture de sécurité ; il ne peut pas être privé d’indemnisation, sauf volonté manifeste de se nuire.

Un passager qui accepte de monter avec un conducteur manifestement ivre reste indemnisable : son comportement ne constitue pas une faute inexcusable (Cass. Civ. 2e, 28 février 1996, n° 94-16.572).

Résumé des bénéficiaires de la loi Badinter :

Victime

Indemnisation garantie ?

Observations

Piéton

✅ Oui, sauf faute inexcusable (sauf vulnérables)

 

Cycliste

✅ Oui, mêmes conditions que les piétons

 

Passager

✅ Toujours indemnisé

 

Conducteur non fautif

✅ Oui, si tiers responsable

 

Conducteur fautif

❌ Non, sauf garantie contractuelle

 

Mineurs < 16 ans / > 70 ans / handicapés

✅ Toujours indemnisés

Protection renforcée

 

La loi Badinter protège efficacement les victimes d’accidents de la circulation, à commencer par les non-conducteurs et les personnes vulnérables. Le cycliste, souvent dans une zone grise, bénéficie aussi de cette protection dès qu’un véhicule motorisé est impliqué.

En revanche, le conducteur reste moins bien protégé s’il est seul en cause ou fautif. Il est donc essentiel pour lui de souscrire une garantie corporelle conducteur, afin d’assurer sa propre indemnisation.

 

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